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02/01/2023
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« Le bref essai de David Rousset est en rupture avec tous les autres témoignages, fussent-ils ceux de militants politiques attentifs au système des camps. Son titre d'abord, avec l'invention de l'adjectif "concentrationnaire" qui deviendra un substantif. Il permet de distinguer les camps qui font système, différents d'autres camps comme ceux de prisonniers de guerre, de réfugiés ou d'internement et l'idée qu'ils forment un "univers à part, totalement clos, étrange royaume d'une fatalité singulière".
De cet univers, David Rousset offre un tableau saisissant, combinant la puissance de l'analyse à la beauté et la violence de la langue. »
Annette Wieviorka
Résistant et déporté, David Rousset écrivit dès son retour L'Univers concentrationnaire. Publié en 1946, son livre reçoit le prix Renaudot. Cet ouvrage fondamental rejoint en 1965, comme Le Convoi du 24 janvier de Charlotte Delbo, le catalogue des Éditions de Minuit qui avaient publié La Nuit d'Elie Wiesel en 1958. -
« Quand, après la défaite de 1940, les nazis occupèrent la France, les écrivains français se trouvèrent aussitôt réduits soit à collaborer, soit à se taire. Et c'est pour leur permettre de s'exprimer quand même à l'insu de l'ennemi que furent fondées les Éditions de Minuit. »
Vercors
Alors que l'on commémore le 80e anniversaire de la Libération de la France et que les derniers témoins disparaissent, il était urgent de republier les mémoires de Vercors, auteur du Silence de la mer et co-fondateur des Éditions de Minuit avec Pierre de Lescure en 1942. Il y raconte l'histoire devenue mythique d'une maison d'édition clandestine dans Paris occupé, dédiée à la diffusion d'une parole et d'une pensée interdites de circulation. On y retrouve les écrivains et poètes Paul Eluard, Louis Aragon, Jean Paulhan, François Mauriac, Robert Desnos... mais aussi les imprimeurs, typographes, relieuses, et cette foule discrète d'anonymes qui participèrent à son activité clandestine et eurent un rôle crucial dans la Résistance. Un prodigieux récit à la première personne qui retrace, mois après mois - jusqu'à la Libération de Paris - cette aventure de résistance éditoriale et intellectuelle sans équivalent. -
On s'obstine à porter aux nues les auteurs de chefs-d'oeuvre, sans prendre la mesure des dégâts qu'ils provoquent. Ils relèguent en effet d'autres créateurs dans l'obscurité, imposent des canons arbitraires à notre sensibilité et déforment notre regard sur le passé.
Ce livre propose d'étudier les mondes alternatifs où ils n -
Aurais-je été sans peur et sans reproche ? Le chevalier Bayard et moi
Pierre Bayard
- Minuit
- 3 Octobre 2024
- 9782707355522
Je me suis souvent demandé comment mon ancêtre le chevalier Bayard - réputé sans peur et sans reproche - avait pu sereinement, au fil de ses batailles, tuer des centaines de personnes innocentes.
Afin d'expliquer ce mystère et de savoir comment je me serais moi-même comporté si j'avais vécu à son époque, je ne vois qu'une solution : voyager dans le passé à sa rencontre, discuter avec lui et ses contemporains en tentant de comprendre leur mentalité et, s'il accepte de m'écouter, lui faire entendre raison. -
Juste après la destruction de l'université de Vincennes en 1980, Deleuze consacre ses premiers cours dans les nouveaux locaux de Saint-Denis à l'Éthique de Spinoza. Ce n'est certainement pas un hasard, étant donné la place centrale chez Deleuze de cette oeuvre immense, unique dans l'histoire de la philosophie, à laquelle il a consacré deux livres.
Ce cours est constitué de quinze séances au cours desquelles Deleuze veut montrer l'importance, non pas théorique, mais profondément vitale de la philosophie de Spinoza. Dans cette traversée, sont abordées des questions fondamentales du spinozisme. Comment se défaire de la négativité des passions mauvaises (haine, ressentiment, envie) ? Comment en finir avec le jugement moral (bien et mal) pour lui substituer une éthique du bon et du mauvais ? Ces questions engagent chez Spinoza une nouvelle théorie des signes. Quels signes doivent guider les existences si elles veulent atteindre, au cours même de cette vie, une forme d'éternité ? Dès lors, quelle différence entre l'éternité - expérimentée ici et maintenant - et l'immortalité que philosophies et religions nous promettent ? De séance en séance, Deleuze montre comment Spinoza met fin à un monde fortement hiérarchisé dont Dieu était le sommet autoritaire et impénétrable, un monde où les individus étaient égarés par des signes sombres et équivoques, pour proposer un monde où règne la lumière de la raison, où Dieu se confond avec les puissances de la nature, où désormais les êtres sont tous à égalité, capables de posséder leur puissance de vie, pourvu qu'ils apprennent à en connaître la logique et la valeur. -
Ay, Silvano !
Regarde ces couleurs sur le desert.
Regarde comme c'est beau.
On a le coucher de soleil pour nous.
Tu veux que je te dise mon avis ?
On a eu du bol de naitre dans cette vie.
¿ Que dices de la vida : bonita, no ?
Elle est belle mais elle est courte, il faut la vivre bien.
Suavemente.
Doucement.
Avec art. -
J'étais plutôt son genre, et elle m'avait dans la peau. Mais pourquoi me demander ça à moi ? Parce que j'étais disponible, malgré mes ennuis ? Parce que j'habitais juste en face, et que Miko, son mari, qui m'invitait souvent à la pêche à la mouche, n'y verrait que du feu ?
Je lui ai demandé si c'était parce qu'elle n'avait pas d'autre solution ? Véritablement, Sally ne savait pas dans quoi elle s'embarquait en ma compagnie. -
Le 18e arrondissement compte 425 rues, squares, places, avenues, cités, jardins, villas, boulevards, impasses et passages que Thomas Clerc a entrepris d'arpenter depuis qu'il y a emménagé récemment. Description totale, née de ses déambulations, dérives et notations, ce livre n'omet rien de ce que la ville laisse voir, entendre et ressentir.
De Montmartre aux abords du périphérique, des habitants de ses quartiers aux touristes égarés, des cafés aux dark stores, de la nuit au jour, l'ancien faubourg de Paris, insurgé sous la Commune, ne cesse de changer d'apparence, quand ce n'est l'auteur lui-même qui le refaçonne au gré de son périple. Le 18e se déroule comme une toile géante où chaque rue est un tableau vivant. -
Dans un menu enfant, on trouve un burger bien emballé, des frites, une boisson, des sauces, un jouet, le rêve. Et puis, quelques années plus tard, on prépare les commandes au drive, on passe le chiffon sur les tables, on obéit aux manageurs : on travaille au fastfood.
En deux récits alternés, la narratrice d'En salle raconte cet écart. D'un côté, une enfance marquée par la figure d'un père ouvrier. De l'autre, ses vingt ans dans un fastfood, où elle rencontre la répétition des gestes, le corps mis à l'épreuve, le vide, l'aliénation.
« Le monde du travail [...] constitue le motif et la matière de ce beau premier roman, d'une intensité maîtrisée, fermement contenue par une écriture d'une âpre et résolue précision. » (Nathalie Crom, Télérama)
« Ce qui fait la valeur d'En salle est son rythme, sa précision, sa colère rentrée, son humour et sa rigueur dans les situations, les portraits, les dialogues : une attention sauvage, portée par le langage. » (Philippe Lançon, Libération)
Ce premier roman a paru à la rentrée littéraire 2022 et a recu le Prix François Mauriac.
« Quel admirable roman. » (Virginie Bloch-Lainé, Elle) -
« Imaginez l'espace d'un film de Cocteau quand les personnages remontent le temps et se déplacent au ralenti, à cause de la force du vent. C'est dans un tel univers visuel que l'auteur de ce livre, devenu personnage à son tour, va et vient. Le lieu imaginé cependant n'a pas pour référence l'antiquité et les vieux murs mais le San Francisco moderne. C'est un San Francisco rendu utopique par la projection systématique d'un nulle part qui est soit l'enfer, soit les limbes, soit le paradis. Dans l'enfer souffle le vent et il est difficile d'avancer. Dans le paradis on tombe sans crier gare. Quant aux limbes c'est là où on va boire un coup. On, c'est-à-dire Wittig et Manastabal, un guide qui est loin d'avoir la douceur du Virgile de Dante, protagonistes d'un opéra des gueuses à la fois féroce et gai et qui comme la comédie de Dante finit bien. Il y a une providence, il y a des anges en chair et en os, il y a des monstres, il y a l'Achéron, il y a les horreurs de l'enfer et les délices du paradis. »
M. W.
La quatrième roman de Monique Wittig a paru initialement en 1985. -
Dans l'arène ennemie - Textes et entretiens 1966-1999
Monique Wittig
- Minuit
- 4 Avril 2024
- 9782707355034
En 1979, Monique Wittig figure en une image toute guérillère la portée de son projet : entrer par effraction « dans l'arène ennemie » pour faire sauter les formes, concepts et catégories qui font de l'hétérosexualité le seul contrat social possible.
Ce volume inédit réunit la riche production de textes, articles et entretiens qu'elle a signés entre 1966 et 1999 - devenus au fil du temps introuvables. Écrits ou publiés en français, anglais, néerlandais, portugais ou allemand, ils constituent autant d'entrées dans l'arène ennemie, toujours fracassantes par leur pouvoir immédiat de mise en cause de nos mythologies modernes.
Édition établie par Sara Garbagnoli et Théo Mantion. -
Faits d'affects Tome 2 : La fabrique des émotions disjointes
Georges Didi-Huberman
- Minuit
- 14 Mars 2024
- 9782707349880
Les faits d'affects sont à valences multiples. Ils méritent donc d'être interrogés dans le pourquoi de leurs motifs souvent inconscients, dans le comment de leurs manifestations gestuelles et, tout aussi bien, dans le pour quoi de leurs destins éthiques et politiques. Car tout cela fonctionne ensemble dans chaque moment de l'histoire.
Ce volume, comme le précédent, s'autorise à vagabonder entre des analyses de cas singuliers très divers, mais pour voir s'y dessiner une configuration particulière bien que, malheureusement, très puissante et répandue. Les faits d'affects y sont réglés selon une disjonction : « fronts contre fronts », en quelque sorte. On entre là dans le vaste domaine d'une anthropologie politique des sensibilités et, notamment, de ce que Svetlana Alexievitch nommait les « documents-sentiments » relatifs à l'expérience des femmes russes enrôlées dans les combats de la Seconde Guerre mondiale. Comment, alors, ne pas s'interroger, en amont sur la « fabrique des émotions » dans le cadre propagandiste nazi, en aval sur la notion économique de « promotion » capitaliste ? Comment, au fil de ce parcours, ne pas revenir à la notion - toujours à revisiter, de Hegel à Marx et de Freud à l'anthropologie contemporaine - du fétichisme, là où justement les relations des sujets aux objets prennent un tour réifié, aliéné, mortifère ?
La disjonction affective ne caractériserait-elle pas, pour finir, ce « malaise dans la culture » duquel nous peinons à nous extraire dans un monde où notre liberté dans le « partage du sensible » se heurte constamment à une sorte de loi du marché affectif ? -
Prière aux vivants pour leur pardonner d'être vivants, et autres poèmes
Charlotte Delbo
- Minuit
- 7 Mars 2024
- 9782707355072
De son retour des camps à sa disparition en 1985, Charlotte Delbo ne cesse d'écrire des poèmes, qu'elle compile dans des cahiers et insère dans la plupart de ses livres.
Ce volume rassemble pour la première fois ses poèmes complets, suivis de dix inédits et un entretien.
« Les poètes voient au-delà des choses. » (C. D.) -
Ce livre, j'ai choisi de l'appeler Vivarium. Mais qu'est le vivarium ici ? Cette série de fragments qui se voudraient abris vitrés pour la mouvante pensée ? Ou bien la vie elle-même qui nous enveloppe et nous prête, comme le biotope de l'animal, un milieu où tenir ? C'est là en tout cas que j'ai résidé un temps, au creux de cette indistinction, dans les échanges incessants du vivant et du nommé, où l'on découvre quelquefois, à la lisière de toutes les choses, de fugaces résolutions, précipités de langage qui semblent, plus qu'à l'ordinaire, faire scintiller le cristal de l'expérience. Or dans l'expérience il y a de tout : des villes et des fleuves, des souvenirs et des questions, des fleurs et des livres, du vent et des lignes d'horizon.
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Ma voix avait change. Des poils duveteux dessinaient sous mon nez les premices d'une moustache et de rebutants boutons me mangeaient le visage. Depuis le début de l'année, on se moquait de moi au college Irene-Joliot-Curie.
Ma mere, elle, ne me supportait plus. Elle se méfiait, même, et m'avait à l'oeil après ce qui s'était passé dans le vestaire du gymnase. J'avais intérêt à bien me comporter durant le week-end chez mes grands-parents.
Pour être honnête, je la comprenais. Mes camarades et elle avaient raison. Avec l'arrivee de la puberte, j'etais en train de devenir un monstre. -
Un couple au bord de la séparation s'offre un séjour en Sicile pour se réconcilier.
À quelques kilomètres de l'aéroport, sur un chemin de terre, leur voiture de location percute un objet non identifié. Le lendemain, ils décident de chercher un garage à Taormine pour réparer discrètement les dégâts.
Une très mauvaise idée.
« On pourrait continuer à se régaler des petites choses par lesquelles le romancier avance en peignant, impitoyable et tendre à la fois, la nature humaine, mais ce serait oublier que Ravey, si minutieux soit-il, convoque toujours d'une manière ou d'une autre l'état du monde. Son comique rentré est pénétré des plus graves questions. Taormine en est une démonstration concentrée. » (Valérie Marin La Meslée, Le Point) -
« Je voulais raconter ça, l'histoire d'une famille de pasteurs qui perd la mémoire. Traiter d'un drame, avec le plus de lumière possible. » (E. D. v. T.)
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Cinq hommes sont partis à la guerre, une femme attend le retour de deux d'entre eux. Reste à savoir s'ils vont revenir. Quand. Et dans quel état.
« On ignorait, au terme du triptyque remarquable des "vies imaginaires" qu'il a composé autour de Maurice Ravel (Ravel), d'Emil Zátopek (Courir) et de l'ingénieur Nikola Tesla (Des éclairs), vers où s'avancerait Jean Echenoz. [...] Refusant l'emphase tragique, mais imprégné d'un indicible chagrin, un fatalisme énoncé à mi-voix, 14 est, à cette interrogation, l'admirable réponse. Une méditation sur la destinée de l'individu, celle aussi des générations. Portée par une phrase qui atteint aujourd'hui sa perfection. Maîtrisée, renversante, superbe jusque dans ses feints relâchements, ses moments d'apparente et grisante désinvolture. » (Nathalie Crom, Télérama)
Suivi de Jean Echenoz, rescapé de la Grande Guerre par Bernard Pivot et d'un entretien avec Jean Echenoz par Eléonore Sulser. -
De 1970 à 1987, Gilles Deleuze a donné un cours hebdomadaire à l'université expérimentale de Vincennes, puis de Saint-Denis à partir de 1980. Les huit séances de 1981 retranscrites et annotées dans le présent volume sont entièrement consacrées à la question de la peinture.
Quel rapport la peinture entretient-elle avec la catastrophe, avec le chaos ? Comment conjurer la grisaille et aborder la couleur ? Qu'est-ce qu'une ligne sans contour ? Qu'est-ce qu'un plan, un espace optique pur, un régime de couleur ?...
Cézanne, Van Gogh, Michel-Ange, Turner, Klee, Pollock, Mondrian, Bacon, Delacroix, Gauguin ou le Caravage sont pour Deleuze l'occasion de convoquer des concepts philosophiques importants : diagramme, code, digital et analogique, modulation. Avec ses étudiants, il renouvelle ces concepts qui bouleversent notre compréhension de l'activité créatrice des peintres. Concrète et joyeuse, la pensée de Deleuze est ici saisie au plus près de son mouvement propre. -
On ne cesse d'affirmer, depuis l'Antiquité et plus encore depuis Freud, qu'OEdipe aurait tué son père. Mais cette accusation ne résiste pas à l'examen. En menant avec rigueur l'enquête sur les circonstances du meurtre et en révélant l'identité de l'assassin, ce livre montre que des pans entiers de notre culture reposent sur une erreur judiciaire.
« Comme les opérations de rectification précédentes, OEdipe n'est pas coupable est drôle, brillant, stimulant et dérangeant. On sait que sous leurs habits provocateurs, les analyses de Pierre Bayard incitent à dépasser les lectures officielles et à penser par soi-même. » (Isabelle Rüf, Le Temps)
« Inutile d'avoir lu Sophocle pour suivre cette nouvelle enquête : notre détective en restitue les sources, (...) et croise enfin les données disponibles avec leurs interprétations successives. Conclusion de cette brillante relecture : OEdipe s'est accusé à tort. Et Pierre Bayard de livrer un ultime coup de théâtre : les pièces de Sophocle cèlent un crime plus grave encore, que Freud n'avait su voir. Le voici révélé pour la première fois. » (Jean-Louis Jeannelle, Le Monde des livres) -
Il est impossible de croire sérieusement, comme les deux héros du célèbre film d'Hitchcock Fenêtre sur cour, que leur voisin aurait tué sa femme, puis l'aurait découpée en morceaux devant les fenêtres ouvertes d'une trentaine d'appartements.
Mais leur délire d'interprétation n'a pas pour seule conséquence de conduire à accuser un innocent. Il détourne l'attention d'un autre meurtre - bien réel celui-là - qui est commis devant les spectateurs à leur insu et mérite l'ouverture d'une enquête. -
« Ici, à Paris, au bord du canal, à deux pas du grand palais indien aux fresques colorées, il pense à vous, le fou qui marche, le fou qui sue, le fou qui boit l'eau fraîche de la fontaine d'Aubervilliers, l'eau filtrée par les sables du sous-sol d'Aubervilliers, l'eau vivante, l'eau habitée, froide et fluctuante. Il pense à vous, le fou, à vous qui chantez l'après-midi lumineux dans vos appartements étroits en regardant une fleur du papier peint qui recouvre les vieux murs humides ou bien une fleur épanouie dans un petit vase de zinc vieilli, de verre dépoli ou de porcelaine fine, ou en épluchant un oignon rouge, cet oignon qui fait pleurer vos yeux, vos yeux de chatte ou de renarde, vos jeunes yeux ou vos vieux yeux de chien battu, en allumant des bougies, les sept bougies du chandelier ou les deux bougies flanquant le portrait fané de votre grand-mère qui vous fait un signe depuis le paysage enneigé d'un lointain passé. Et ce fou vous écrit qu'il faut peut-être changer de terre, de globe, de famille ou de pays. Il vous aime tant tous les trois, tous les dix-sept, tous les milliards, comme féerie indispensable au bon cours des choses, comme fantôme bienveillant. »
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Au château, il y a le père, vieux lion du cinéma français et gloire nationale. Il y a la jeune épouse, ex-Miss Provence- Alpes-Côte d'Azur, entièrement dévouée à sa famille et à la paix dans le monde. Il y a les jumeaux, la demi-soeur. Quant à l'argent, il a été prudemment mis à l'abri sur des comptes offshore. Au château, il y a aussi l'intendante, la nurse, le coach, la cuisinière, le jardinier, le chauffeur. Méfions-nous d'eux. Surtout si l'arrêt mondial du trafic aérien nous tient dangereusement éloignés de nos comptes offshore.
« Le décalage ironique est d'emblée donné de cette délicieuse, rocambolesque et acerbe farce, où la réalité se joue de la fiction avec des accents de polar et de comédie de boulevard. » (Fabienne Pascaud, Télérama)
« On se délecte à nouveau, dans ce cinquième livre, de son art de peindre l'époque, élégamment mais impitoyablement, en touches légères et cruelles. (...) Surtout, au-delà de la virtuosité narrative, Monument national esquisse une réflexion sur les fantasmes et les rêves qui nous animent. » (Renaud Pasquier, La Croix) -
« - Une dernière chose, je ne jouerai qu'une seule partie. Veuillez prévenir ces messieurs à l'avance pour que cela ne paraisse pas discourtois après coup. Cette partie doit solder les comptes, et rien d'autre. Un trait final, pas un nouveau départ. »
Connue, en France, sous le titre Le Joueur d'échecs, la Schachnovelle est le dernier texte qu'ait écrit Stefan Zweig avant de se donner la mort à Petrópolis en 1942.
Jean-Philippe Toussaint a réalisé cette nouvelle traduction pendant l'écriture de son dernier livre, L'Échiquier, qui paraît simultanément aux Éditions de Minuit.